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Après la vague épidémique, le rééquilibrage des activités s'amorce

Le CH comme la clinique Saint-François d'Haguenau, dans le Nord-Alsace, s'engagent dans une nouvelle phase, plus difficile que la gestion de l'épidémie. Ils entament la réorganisation de leurs activités pour faire face aux nouveaux besoins accrus des patients tout en maintenant des capacités en cas de remontées du Covid-19.
La déprogrammation des actes avant l'épidémie conduit à un accroissement des opérations urgentes de chirurgie auxquelles doivent répondre les établissements tout en préservant les capacités de réanimation dédiées au Covid-19.
La déprogrammation des actes avant l'épidémie conduit à un accroissement des opérations urgentes de chirurgie auxquelles doivent répondre les établissements tout en préservant les capacités de réanimation dédiées au Covid-19.

Moins touché que Mulhouse (Haut-Rhin) et le Sud-Alsace, le territoire d'Haguenau (Bas-Rhin), dans le Nord-Alsace, s'est fortement mobilisé pour faire face à la vague épidémique de la maladie Covid-19. "Le propre des établissements alsaciens est d'avoir fait face très vite à une explosion épidémique. Nous avons dû nous débrouiller en faisant preuve de bon sens et d'échanges. Sans nous concerter, nous avions pris les mêmes décisions et étions préparés de façon homogène à répondre à l'épidémie", détaille à Hospimedia Matthieu Ledermann, directeur général de la Fondation Saint-François qui dispose d'une clinique éponyme à Haguenau. Au sein du CH d'Haguenau, une cellule de veille, puis de gestion de la crise, a été mobilisée dès le 27 février, indique à Hospimedia le directeur, Mathieu Rocher — également directeur du CH intercommunal de la Lauter de Wissembourg (Bas-Rhin).

Un désarmement progressif

Après une phase d'extension des capacités de réanimation ou d'hospitalisation dédiée au Covid-19, les établissements d'Haguenau se préparent à une nouvelle phase, celle du rééquilibrage des activités. Il s'agit de trouver un "dosage subtil", d'après Mathieu Rocher, entre le maintien de capacités pour faire face à une remontée de l'épidémie et la réponse aux besoins des patients. Par exemple, les six lits de l'unité de soins continus convertis en lits de réanimation sont actuellement neutralisés. "Nous avons gardé les lits et les respirateurs en place, les armoires de pharmacie sont garnies, nous pouvons disposer des locaux immédiatement" en cas de remontée des besoins en réanimation, rapporte Mathieu Rocher.

En 48 heures, il estime possible de disposer d'un planning pour attribuer des équipes à ces lits rouverts. "Plus le temps passera et plus ce sera compliqué à refaire", estime-t-il à propos d'une mobilisation très rapide des ressources humaines. Dans ce contexte où les possibilités sont limitées, les équipes d'encadrement essaient de faire "souffler les équipes" avec la légère décrue de l'activité Covid-19. Le directeur estime cependant que le CH a encore besoin d'une partie des renforts des équipes des cliniques Sainte-Odile et Saint-François, d'autres établissements, comme le CH de Bischwiller ou de l'Union pour la gestion des établissements des caisses d'assurance maladie (Ugecam), ainsi que des professionnels de ville.

À la clinique Saint-François, le tiers des effectifs soignants (soit 57 personnes) s'est porté volontaire pour renforcer les établissements alsaciens. Pour se réorganiser avec un effectif plus réduit, la clinique a procédé au regroupement de ses unités d'hospitalisation sur un seul plateau. L'activité de chimiothérapie en hospitalisation de jour a été maintenue avec un circuit dédié et des contrôles par scanner pour prévenir des contaminations au Covid-19. L'unité de médecine interne a quant à elle été transformée en unité de médecine Covid-19. "Nous allons la désarmer progressivement, la pression diminue en se déplaçant vers le SSR", avance Matthieu Ledermann. La constitution de cette unité visait à délester le CH de certains patients.

Dans le Nord-Alsace, les parcours des patients atteints par le coronavirus sont tracés des urgences jusqu'au SSR, en concertation avec les établissements concernés pour éviter à l'un des acteurs de se retrouver débordé. La sortie de réanimation se fait par palier. Tout d'abord, le patient demeure à proximité immédiate du service de réanimation afin de parer à une nouvelle décompensation et de transférer directement des patients encore lourds aux autres structures avant de continuer des transferts vers d'autres lits plus éloignés. "Les circuits sont enclenchés" depuis le CH d'Haguenau où le nombre de patients en réanimation diminue, note Mathieu Rocher. "Le SSR a vraiment répondu présent", abonde Mathieu Ledermann.

Des interventions du CHU dans les blocs

Dans le même temps, les nouveaux besoins, notamment en chirurgie, se font de plus en plus pressants, d'autant plus que les Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS, Bas-Rhin) pleinement mobilisés sur la réanimation et le Covid-19 ne sont pas en mesure de garantir, sur site, toutes les opérations chirurgicales urgentes. Ainsi, une filière s'est construite entre les HUS et la clinique Saint-François sur les cancers digestifs. "Un praticien universitaire vient opérer des patients du CHU à la clinique. Ce qui était pressé avant la déprogrammation devient une urgence pour ces patients dont l'état est de plus en plus dégradé", explique le directeur général de la fondation.

À son sens, cette nouvelle phase qui s'ouvre vise à désarmer des réanimations Covid-19 pour réarmer des salles de réveil afin d'éviter des décès dus à des pathologies autres que le Covid-19. "Le plus dur est maintenant", poursuit-il en évoquant la lourdeur accrue des patients et la fatigue des équipes. Un effet boule de neige entre la réponse aux maladies chroniques et une deuxième vague du Covid-19 est ainsi crainte.

Au sein du CH d'Haguenau, des praticiens des HUS disposent d'un accès au bloc opératoire pour réaliser des opérations de cancérologie et d'urologie. Une reprise des activités programmées demeure pour le moment exclue par la direction, qui entend répondre aux besoins urgents pour prévenir des pertes de chance. L'activité des urgences de l'hôpital commence par ailleurs à remonter. "Nous sentons que ça frémit, y compris sur les urgences cardiaques. Nous devons accompagner cette légère augmentation sans pour autant reprogrammer les activités", résume Mathieu Rocher.

Enfin, à plus long terme, se pose la question du retour à la normale. Au CH d'Haguenau, la temporalité est encore celle de la cellule de gestion de crise, réunie quotidiennement, et non celle du fonctionnement habituel des instances de l'établissement. Quant à Matthieu Ledermann, il estime que la "discussion de centre aigu à centre aigu" dans la gestion de l'épidémie a "aveuglé" les autres volets de la logique du parcours qui prévaut. "Le maintien à domicile et la coordination, qui sont l'alpha et l'oméga du système de santé de demain, ont eu très peu d'écho. Nous avons perdu ce que nous pensions avoir capitalisé", avance-t-il. Un système d'information territorial demeure néanmoins en réflexion pour faciliter la coordination ville-hôpital.

Jérôme Robillard

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