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La facture du Covid-19 coûte déjà de 850 M€ à 1,25 Md€ aux hôpitaux et Ehpad publics

Déjà plus que conséquents, les surcoûts liés au coronavirus sur les budgets des établissements publics de santé et médico-sociaux risquent fort de continuer à grimper. Dans ses exigences de déconfinement, la FHF réclame leur compensation à 100%."Ça chiffre très très vite." Comme le souligne Cécile Chevance, en charge du pôle finances à la FHF, l'estimation nationale des surcoûts des deux premiers mois de la crise sanitaire liée au coronavirus fluctue déjà entre 600 et 900 millions d'euros (M€) pour les seuls hôpitaux publics. Avant même la vague épidémique, les établissements positionnés en première ligne face au Covid-19 chiffraient leurs dépenses supplémentaires pour s'y préparer à 1 M€, pour moitié en investissement pour l'autre en fonctionnement. En deuxième ligne, cette somme avoisinait plutôt les 500 000 € avec une répartition peu ou prou identique.

Des surcoûts "multipliés par 3, 4 voire 6"

Depuis, les montants se sont rapidement envolés. En région Grand-Est par exemple, les surcoûts ont tôt fait d'être "multipliés par 3, 4 voire 6", a indiqué la responsable des finances ce 28 avril à l'occasion d'un point presse de la fédération. À cela s'ajoutent les pertes de recettes potentielles dues à la mise en suspens d'un pan entier de l'activité hospitalière. Côté Ehpad, les évaluations nationales varient déjà et de manière "inéluctable" entre 250 et 380 M€, pour moitié en surcoûts pour l'autre en pertes de recettes. La dynamique de reprise des admissions — qui se sont quasiment taries — étant pour l'heure méconnue (d'ordinaire, la moyenne mensuelle est à 25 000 admissions en Ehpad tous secteurs confondus), ces estimations vont rapidement devenir désuètes, n'a pas caché le conseiller stratégique de la FHF, Marc Bourquin.

Face à cela, la fédération plaide toujours pour une compensation intégrale des pertes et surcoûts, avec entre autres l'assurance d'une prise en charge à 100% des séjours Covid-19, y compris hors réanimation. Elle le martèle d'ailleurs dans ses "prérequis" pour le déconfinement adressés tout récemment au Gouvernement (à télécharger ci-dessous et lire le deuxième encadré). Dans le champ sanitaire, certains signes semblent cependant aller dans le bon sens. C'est par exemple la diffusion anticipée de la première circulaire tarifaire, qui alloue 246 M€ d'aides en trésorerie (contre plutôt 150 M€ d'habitude) et 377 M€ de crédits pour compenser les surcoûts (lire notre article).

L'Uniopss lance une enquête flash sur le médico-social

À l'instar de la FHF et en l'attente de l'enquête nationale confirmée le 22 avril par la présidente de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, Marie-Anne Montchamp, l'Uniopss y va elle aussi de son audit budgétaire. Un questionnaire a ainsi été élaboré "pour avoir des premiers éléments" sur les surcoûts rencontrés sur l'ensemble des établissements et services sociaux et médico-sociaux, "et plus généralement toutes les structures privées non lucratives". Les données, anonymisées, portent sur les surcoûts observés du 1er mars au 30 avril. Elles peuvent être remontées jusqu'au 15 mai.

De premiers crédits restitués fin juin

Quant au projet d'arrêté relatif au périmètre de la garantie de financement, la FHF a obtenu quelques infléchissements de l'exécutif en guise de réponse à son courrier d'alerte. Une première restitution partielle et anticipée de la sous-exécution importante annoncée et inévitable de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) interviendrait fin juin sans attendre donc décembre.

En revanche, le taux d'évolution de l'Ondam 2020 ou de ses différentes enveloppes sur la base 2019 des recettes d'hospitalisation va bel et bien s'appliquer d'une manière limitée, tenant compte uniquement du taux d'évolution tarifaire (+0,2% hors incitation financière à l'amélioration de la qualité, Ifaq) et non de celui de l'enveloppe tarifs (fixé à 1,9% en 2020, lire notre article). Pour autant, note Cécile Chevance, le "plan B" sur lequel le ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran, s'est engagé par écrit mais qui ne sera pas dûment écrit dans l'arrêté à venir, devrait faire en sorte d'arriver à peu près au même résultat.

Un grand "silence" sur les Ehpad

En revanche, l'inquiétude reste particulièrement prégnante dans le médico-social. Les établissements sont toujours dans l'attente de la circulaire budgétaire 2020. Et à entendre Marc Bourquin, le Gouvernement n'a encore fourni aucune précision sur les modalités de compensation des surcoûts, si ce n'est d'évoquer une instruction à paraître mi-mai sans en dévoiler le contenu. C'est également un "silence assourdissant" sur le financement de la prime exceptionnelle allouée aux personnels tout comme sur la compensation des pertes de recettes. Or celles-ci sont loin d'être négligeables dans un secteur où la moitié des ressources proviennent directement des usagers via les tarifs d'hébergement. La situation financière des Ehpad risque donc de devenir "rapidement incontrôlable", prévient l'intéressé (lire ici et nos articles).

Selon lui, "la solidarité nationale doit jouer là aussi intégralement" avec le versement par les ARS de crédits de l'assurance maladie non reconductibles. Pas question, prévient la FHF, de renvoyer la question aux départements avec le risque que cela génère une disparité de situations entre Ehpad selon les territoires, source d'inéquités financières.

La FHF liste 8 exigences pour réussir le déconfinement :

  • une "transparence" sur le modèle épidémiologique utilisé, afin de "poser une règle générale sur les capacités de réanimation qui devront rester dédiées Covid-19" dans l'ensemble des établissements de santé, publics comme privés ;
  • des "garanties fortes" sur les équipements de protection individuelle, la disponibilité des tests, les approvisionnements logistiques et ceci après une première phase quelque peu "erratique" ;
  • un "dépistage systématique des professionnels et patients à l'entrée des établissements", ainsi que l'organisation de cellules de traçage des cas suspects pour ensuite les isoler ;
  • une sécurisation "absolue" qui s'installe dans le temps des circuits internes Covid/non-Covid dans l'ensemble des établissements, au-delà des aménagements fait à la va-vite pour parer à l'urgence ;
  • la redémarrage de tous les parcours patients, en particulier les filières d'aval, ce qui suppose de consacrer des moyens conséquents aux SSR (lits, personnels, matériels) ;
  • une sécurisation des circuits en Ehpad et établissements accueillant des personnes en situation de handicap, surtout s'agissant de l'accès des nouveaux entrants pour "réalimenter leur fonctionnement" ;
  • une compensation à 100% des surcoûts et pertes de recettes dans le sanitaire et le médico-social ;
  • la prise en compte des besoins des professionnels de santé en matière d'effectifs, de garantie des congés d'été, de garde d'enfants, de facilité de transports, etc.

Agathe Moret et Thomas Quéguiner

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